Par une décision du 22 mai 2014 prise à l’unanimité, le Conseil d’administration d’Équinoxe Nancy Lorraine a renoncé à intégrer « Le Kreuji – Maison LGBT de Nancy », malgré 2 ans et demi de participation à l’intégralité des travaux préparatoires.
Pour que notre décision, lourde de sens et de conséquences, soit comprise par le plus grand nombre – à défaut d’être unanimement approuvée – nous tenons à revenir point par point et en détails sur les différents éléments qui nous ont conduits à ce retrait.
La constitution d’un grand Centre LGBT rassemblant les associations de la ville était pourtant une des revendications d’Équinoxe, dès la naissance de l’association, en 2008. En effet, la disparition fin 2007 du Centre LGBT animé par l‘association Homonyme avait laissé Nancy sans lieu d’accueil LGBT généraliste, mixte et ouvert à tous les publics.
Prenant rapidement de l’ampleur dès les premiers mois, Équinoxe a compris l’importance de ressusciter un Centre LGBT pour accueillir les personnes en demande dans les meilleures conditions. Pendant des années, cette revendication a été ignorée par la Ville de Nancy, qui la jugeait irréalisable. Avant de changer complètement d’attitude, puis, avec l’arrivée de Laurent Hénart, de tout faire pour écarter Équinoxe de la démarche.
Une parodie de démocratie : le verrouillage par la Ville de Nancy
Equinoxe déplore la totale emprise de la Ville de Nancy sur le projet « Kreuji » et ses associations fondatrices, impliquant un fonctionnement interne consternant, une démocratie fort contestable et des conflits d’intérêts préoccupants.
Une maison LGBT-UDI-UMP
En dépit de nos demandes répétées d’élargissement des discussions à d’autres partenaires institutionnels, en particulier le Conseil général de Meurthe-et-Moselle et le Conseil régional de Lorraine, la Ville de Nancy les a sciemment écartés, promettant de les associer « une fois que tout serait bouclé » (dixit Lucienne Redercher, adjointe aux droits de l’Homme, comité de pilotage du 28/11/2013), autrement dit au moment de passer à la caisse…
Il apparaissait évident à Equinoxe et à l’Association Nationale Transgenre (ANT) d’associer le département et la région en amont d’un projet d’une telle ambition, afin de lui donner une solide et pérenne assise financière, ainsi qu’une vraie indépendance politique. Cela n’a jamais été l’avis de la municipalité, de couleur partisane UDI-UMP, qui n’a pas souhaité s’associer à des institutions à majorité socialiste, particulièrement dans l’optique des élections municipales de mars 2014 qui s’annonçaient très serrées.
Le bluff des groupuscules
A l’origine des premiers travaux en janvier 2012, pas moins de 13 associations étaient réunies autour de la table. Outre Equinoxe Nancy Lorraine et ANT, on pouvait également compter Objectif Egalité Lorraine, L’Autre Cercle Lorraine, Les Oublié-e-s de la Mémoire Lorraine, Honneur aux Dames, Les Joyeux Reporters, Rando’s Lorraine, LesBienNées, David & Jonathan Lorraine, Club Alter Egaux, Aides 54 et APGL Grand-Est. Cette profusion d’associations pour une ville comme Nancy pourrait laisser penser à une très belle diversité et un grand dynamisme.
Hélas, nombre de ces structures n’avaient – et n’ont encore, selon les cas – qu’une existence très symbolique : aucune permanence d’accueil, une très faible activité de terrain, une absence d’implication dans les grands événements LGBT annuels (17 mai, Marche des Fiertés, etc.) et un nombre d’adhérents souvent (très) réduit.
Mais dès l’origine, la Ville de Nancy a considéré que chaque association détenait une voix délibérative, qu’elle compte 3 adhérents comme le Club Alter Egaux, une quinzaine comme LesBienNées ou L’Autre Cercle, ou une centaine comme Equinoxe. Dans un contexte déjà conflictuel entre associations, né de vieilles querelles liées à la disparition d’Homonyme en 2007, ou de la scission douloureuse organisée fin 2011 au sein d’Equinoxe par des éléments hostiles (discrets au début, tous se sont par la suite révélés des proches de Laurent Hénart et/ou de l’adjointe aux droits de l’Homme de Nancy), la conséquence était prévisible : des réunions délétères, où nos propositions ont été régulièrement balayées par une nette majorité de voix, pourtant détenue par une minorité d’adhérents réels.
La faiblesse de ces groupuscules, ou leur implantation extra-nancéienne, s’est traduite depuis par la disparition de plusieurs d’entre eux, faute d’adhérents : David & Jonathan et APGL Grand-Est (courant 2012), Club Alter Egaux (en novembre 2013), LesBienNées (en février 2014), mais la situation était déjà parfaitement verrouillée pour empêcher Equinoxe et l’ANT de peser sur les débats et le contenu réel de la Maison LGBT. En effet, 6 associations cumulant péniblement 40 adhérents, pesaient 6 fois plus que la centaine d’adhérents d’Equinoxe, association la plus active et la plus représentative à Nancy.
De là à penser que des groupuscules nés au moment du lancement du projet sont des coquilles vides créées par la Ville de Nancy et dirigées par des proches, il n’y a qu’un pas…
11 associations impliquées ?
Aujourd’hui, face à l’hémorragie de structures réellement impliquées dans la gestion quotidienne du lieu, ses 4 dirigeants sont contraints d’aller glaner des soutiens symboliques loin de Nancy pour afficher officiellement 11 associations au compteur, à l’automne 2014.
Il est donc utile de préciser ici que 4 d’entre elles ne sont pas à Nancy : Le Refuge n’a pas de délégation dans la cité ducale ; Couleurs Gaies, Centre LGBT de Moselle (qui sont d’ailleurs la même structure…) et Contact 57 sont à Metz. Bien entendu, il est hors de question de condamner ces 4 associations qui n’ont aucune raison de douter à distance de la sincérité du projet. Il est juste nécessaire de rappeler que ces soutiens « prestigieux » servent à masquer le vide associatif interne, et à donner une épaisseur factice au projet, pour attirer le chaland peu informé des réalités de terrain. 11 associations, ça en jette ! Même si derrière la façade, c’est une autre affaire !
En outre, plusieurs associations de Nancy ont rappelé à maintes reprises lors des réunions préparatoires qu’elles ne s’impliqueraient pas dans la gestion quotidienne du lieu, faute de bénévoles ou parce que cela ne rentre pas dans leur objet statutaire : Aides 54, Les Joyeux Reporters et Rando’s Lorraine sont donc également de simples soutiens, symboliques.
Il ne reste ainsi que 4 associations locales pour gérer ce projet, dont une seule a une existence autre que symbolique (Honneur aux Dames), ce qui nous paraît disproportionné pour tenir la distance sur un tel investissement. Il est donc inenvisageable pour Equinoxe et l’ANT d’épuiser leurs bénévoles, déjà très sollicités par leurs propres structures et leurs engagements nationaux (à la Fédération LGBT notamment), dans un projet où ils ne sont clairement pas les bienvenus. Il s’agirait de la meilleure façon de les écœurer définitivement de l’engagement LGBT bénévole. Mais c’est peut-être ce que souhaite la Ville de Nancy : faire décoller sa Maison LGBT aux dépens du Centre LGBT Lorraine-Sud, pré-existant et membre actif de la Fédération LGBT…
Entrisme, noyautage et endogamie politique
Sur les quelques associations de Nancy officiellement impliquées dans le projet « Kreuji », la plupart d’entre elles ont des liens très étroits avec la municipalité.
Les Oublié-e-s de la Mémoire Lorraine et L’Autre Cercle Lorraine sont dirigées par la même personne, M. Thierry Ragot, un proche de Laurent Hénart devenu trésorier du « Kreuji », et dont le mari Pascal Dabel en est le président. Il est ici utile de préciser que Franck Porterat, bras droit de l’adjointe aux droits de l’Homme, n’hésitait pas à s’afficher publiquement aux couleurs de L’Autre Cercle Lorraine à la Marche des Fiertés de Metz le 2 juin 2012 [cf. document 1], oubliant qu’il était l’interlocuteur de toutes les associations, dans un contexte déjà tendu.
Document 1. Photographie disponible sur demande dans nos locaux : Franck Porterat, aux couleurs de L’Autre Cercle Lorraine, sur le stand d’Equinoxe à la Marche des Fiertés LGBT 2012 de Metz
Les Joyeux Reporters, pourtant annoncés moribonds par leurs propres amis et au bord de la dissolution lors du comité de pilotage du 6 février 2014, vivotent depuis près de 10 ans dans le giron de la Ville de Nancy, qui est au centre de leur seule activité, largement subventionnée : la publication d’un petit bulletin désormais annuel où les hagiographies des élus municipaux (en particulier Lucienne Redercher) succèdent aux désinformations sur la vie LGBT nancéienne.
Le Club Alter Egaux, qui a suscité moult polémiques pendant des années dans le milieu LGBT lorrain par ses prises de position transphobes et anti-marches LGBT, était lié de près à plusieurs élus, puisque ses deux uniques responsables étaient membres actifs du MoDem 54, le parti de Lucienne Redercher et de Thierry Coulom, qui ont travaillé sur le projet.
Evoquons enfin Honneur aux Dames, avec qui nous avons travaillé positivement pendant près de 2 ans dans le cadre de la Marche des Fiertés LGBT de Nancy, et qui a soudainement pris ses distances avec Equinoxe et l’ANT en avril 2014. L’élection fin mars de sa présidente, également vice-présidente du « Kreuji », dans la majorité de droite de la commune de Pont Saint-Vincent (agglomération de Nancy) est sans doute un pur hasard du calendrier…
Avec de tels conflits d’intérêts, on comprend mieux l’application de ces responsables associatifs à se transformer en relais politiques de la Ville de Nancy, fermant au passage les yeux sur ses dérives et ses nouveaux alliés, et taxant les non-alignés « d’extrême-gauche » (totalement grotesque, cette allégation a provoqué la colère de tous les adhérents d’Équinoxe !).
La municipalité a contrôlé durant la totalité des débats la majorité des votes, et a donc tout piloté stricto sensu, autant en externe qu’en interne, tout en simulant un joli projet inter-associatif. Aujourd’hui, le comité de direction du « Kreuji » est réduit à 2 couples, proches de Laurent Hénart et de la droite locale, ce qui n’augure pas d’une ouverture exemplaire pour la Maison, qui pousse le culot jusqu’à se décréter « apolitique »…
L’égalité des droits ? On verra plus tard !
Outre l’incroyable fonctionnement interne, particulièrement chronophage et énergivore pour les bénévoles lors des comités de pilotage, le point de rupture fondamental entre Equinoxe et le « Kreuji » porte sur les valeurs d’égalité que nos associations doivent théoriquement défendre avec la plus grande fermeté, dans un contexte national marqué par les résurgences réactionnaires et néofascistes les plus violentes.
1er août 2013 : l’insulte à Jean-Pierre Humblot et à toutes les victimes
Chaque année la municipalité, organisatrice sans partage de l’hommage officiel à Jean-Pierre Humblot, assassiné par des homophobes à Nancy le 1er août 2003, charge les associations LGBT de se mettre d’accord sur un porte-parole unique à la cérémonie.
En 2013, un des militants connus d’Equinoxe, également agressé par le même groupe quelques jours avant Jean-Pierre Humblot, avait souhaité prendre la parole en tant que victime, pour marquer à sa façon le dixième anniversaire d’un drame qui a aussi bouleversé sa vie. Piétinant son expérience, les associations fondatrices du « Kreuji » ont voté massivement pour donner la parole au président du Club Alter Egaux, sous prétexte qu’il n’avait encore jamais été désigné en 10 ans.
Et pour cause, puisque cette association et lui-même s’étaient rendus célèbres pour leurs condamnations répétées des gays « excentriques » (comme Jean-Pierre Humblot !), des Marches des Fiertés (avec l’emblématique phrase « L’exhibition n’a pas sa place dans l’espace public ! »), et l’appel à discriminer les personnes transgenres, par la psychiatrisation forcée et en les appelant par leur prénom d’origine « parce que c’est la loi » (sic). (NB : Les dérapages d’Alter Egaux avaient fait l’objet d’un communiqué de dénonciation cosigné par Equinoxe / Couleurs Gaies / Trans Aide (ANT) en mai 2009, à leur sortie bruyante du Collectif LGBT Lorraine).
Après une réunion de conciliation houleuse où ces associations avaient semblé reculer face aux déclarations insoutenables du Club Alter Egaux, qui les maintenait et les assumait fièrement, un accord avait été trouvé pour une autre prise de parole plus consensuelle. Finalement, Lucienne Redercher a annulé autoritairement, au dernier moment, ce compromis et toute prise de parole associative afin de ménager ses deux amis du MoDem.
Le jour J, la Ville a finalement proposé une prise de parole, ce que le transphobe incriminé, discours déjà en poche, s’est empressé de faire sans que personne parmi les Kreujistes n’y trouve à redire, ce qui prouve que le coup était totalement prémédité, dans notre dos. Equinoxe et l’ANT ont préféré quitter silencieusement la cérémonie, qui s’est transformée en insulte aux victimes d’homophobie et de transphobie, en offense ultime à Jean-Pierre Humblot.
Pour rappel, la sœur de Jeannot avait fini par dévoiler en août 2009 que son frère, tué en raison de son apparence « excentrique », était une personne trans-identitaire. Pour le savoir, encore faut-il avoir une culture militante locale et ne pas sortir de nulle part en janvier 2012…
L’infiltration de La Manif Pour Tous dans le Conseil municipal
Au cours d’une campagne municipale à couteaux tirés, où le centriste Laurent Hénart était opposé au socialiste Mathieu Klein, le futur maire de Nancy a ratissé particulièrement large à sa droite, en menant une campagne plutôt digne de la Droite Forte, à coups d’insécurité et de caméras de vidéosurveillance.
Laurent Hénart, que beaucoup de Nancéiens ne reconnaissent plus depuis son élection, a rapidement récompensé ses soutiens de l’ultra-droite. Dès la mi-avril 2014, deux semaines à peine après le scrutin, l’ancien responsable régional de La Manif pour Tous, M. Pierre de Saulieu, a obtenu une place au sein du conseil municipal, aux côtés d’autres élues qui avaient déjà défilé contre nos droits ou manifesté leur hostilité : Valérie Debord et Fanny Giussani pour ne pas les citer. M. de Saulieu aurait pu être affecté à la voirie, une tâche utile mais peu suspecte de cliver, mais Laurent Hénart a préféré lui confier les écoles municipales ! Tout un symbole.
Trois associations se sont rapidement indignées, dont Equinoxe et l’ANT le 18 avril, à qui Laurent Hénart a répondu avec mépris le 20 avril qu’il n’avait aucune leçon à recevoir, que « tout ça allait s’évacuer » (sic !) et que M. de Saulieu avait quitté LMPT. Dès le 23 avril, à peine 3 jours plus tard, les associations kreujistes prenaient le thé « au nom du dialogue » avec le leader régional des manifestations homophobes qui les avait convoquées, et faisaient profil bas pour s’assurer une belle Maison LGBT, alors qu’il leur affirmait les yeux dans les yeux qu’il ne marierait jamais deux personnes de même sexe… Au passage, Equinoxe et l’ANT, qui avaient décliné cette offre indécente – que pourrions-nous bien avoir à négocier avec un homophobe ? – ont reçu les insultes habituelles : « extrémistes », « sectaires ». Il est vrai que les dirigeants du « Kreuji », qui copinent ouvertement avec la tête de liste FN aux dernières municipales de Nancy, s’y connaissent en extrémistes !
Depuis, M. de Saulieu a appelé à manifester pour la mobilisation homophobe et transphobe du 5 octobre dernier, prouvant d’une part qu’il n’avait pas abjuré l’homophobie et que nous avions raison – il appartient désormais à L’Avenir pour Tous de Frigide Barjot… – et d’autre part que Laurent Hénart et son « Kreuji » se sont faits rouler dans la farine tels des lapins de trois semaines.
Rappelons un détail non négligeable : en 2013, dans un contexte de mobilisation intensive de La Manif pour Tous et de ses nouveaux corollaires néofascistes (Lorraine Nationaliste, Bloc Identitaire, Le Printemps Français, etc.), les signalements d’homophobie ont augmenté de près de 80% pour la seule structure SOS Homophobie !
L’entrisme du Front National
Bien obligés de jouer les voitures-balais pour récupérer un maximum de soutiens de tous horizons dans ce gruyère associatif, Laurent Hénart et les Kreujistes ont oublié de se fixer toute limite éthique dans ce putsch sur la vie LGBT à Nancy.
Le 27 septembre dernier, au cours de la Fête des Associations qui marquait la première sortie publique des Kreujistes, et au cours de laquelle Equinoxe et l’ANT avaient été reléguées dans un recoin – attitude choquant même certains employés municipaux avec qui nous avons échangé – quelle ne fut pas notre surprise de découvrir Pierre Ducarne, tête de liste du Front National aux dernières municipales à Nancy, co-animant le stand du « Kreuji » !
Nous nous sommes légitimement indignés de cette présence très dérangeante. La Ville de Nancy et ses courtisans ont bien tenté de minimiser l’affaire, prétextant une simple visite d’un gay frontiste qu’ils ne connaissaient pas, et une tentative politique d’Equinoxe de déstabiliser le « Kreuji ».
Si dans un premier temps cette communication de crise a fonctionné, les événements récents ont prouvé que nous avions – encore – raison à plusieurs titres. Pierre Ducarne a manqué de peu l’exclusion du FN, dont il prétendait pourtant ne plus être membre (!), pour avoir animé ce stand LGBT (il l’a effectivement bien animé pendant près d’une heure [cf. document 2], prouvant ses mensonges, ceux de la Ville et ceux du « Kreuji »). Par cette procédure d’exclusion, le FN a en passant rappelé toute la considération qu’il avait pour les personnes LGBT.
Document 2. (Photographie disponible sur demande dans nos locaux ) Pierre Ducarne, confortablement installé derrière le stand « Kreuji », en pleine discussion avec Franck Porterat. Les dirigeants du « Kreuji » qui prétendaient ne pas le connaître sont juste à côté…
Heureusement M. Ducarne, proche collaborateur de l’improbable porte-parole d’Objectif Egalité Lorraine par le biais de Radio Caraïb Nancy, a rappelé à ses amis du FN qu’il était opposé à la totalité de nos revendications (portées aujourd’hui par 95% du mouvement LGBT français), ce qui lui a permis de sauver sa place chez les frontistes, d’où la satisfaction de M. Ducarne que la polémique soit enfin close… Ubuesque !
Si nos associations se doivent d’être ouvertes à la diversité des opinions politiques et religieuses, elles ne peuvent décemment pas tolérer dans leurs rangs des cadres identifiés de mouvements homophobes, tels que le FN et la Manif pour Tous, qui se sont toujours violemment opposés à nos droits les plus élémentaires, et qui attisent constamment la déstabilisation d’une République aux abois.
Qu’on se le dise une bonne fois pour toutes, nous n’avons aucune leçon de tolérance à recevoir de La Manif pour Tous et du Front National. LGBT ou non, les xénophobes, les racistes, les antisémites, les islamophobes, les homophobes, les transphobes n’ont pas vocation à figurer dans nos associations, qui luttent certes contre les LGBT-phobies, mais qui sont également solidaires de toutes les autres luttes citoyennes contre les discriminations. On imagine bien quelle tête ferait un jeune gay musulman issu de l’immigration s’il était accueilli dans un cadre LGBT par le leader local du FN…
Un projet anti-Équinoxe, anti-Centre LGBT de Lorraine-Sud
Dès 2008, les premiers désaccords ont opposé Equinoxe Nancy Lorraine/ANT d’un côté, et la Ville de Nancy de l’autre. Les mêmes ressorts étaient en cause : la municipalité soutenait en façade les associations, mais à la seule condition qu’elles restent peu revendicatives et très obéissantes.
L’emblématique « affaire Capleton » de novembre 2008, où un chanteur de ragga dancehall violemment homophobe avait réussi à se produire à Nancy sans l’intervention de la Ville malgré nos vives protestations, a été le premier coup de canif dans notre partenariat. Face à notre fermeté, les premiers chantages aux subventions sont tombés, nous permettant rapidement de relativiser le « soutien » municipal dès lors qu’il fallait s’engager sur des actes forts et non de belles promesses. Pour l’anecdote, Capleton s’était produit à L’Autre Canal, une salle de spectacles alors placée sous la présidence de… Laurent Hénart.
La scission en service commandé de 2011, la naissance du Centre LGBT de Lorraine-Sud
Après une année associative particulièrement chaotique, Equinoxe Nancy Lorraine avait subi, au terme de son Assemblée Générale du 15 octobre 2011, son unique scission. Soumise pendant de longs mois à des campagnes violentes de dénigrement, en interne et sur la toile, l’association était alors sous le choc de cette offensive virulente, menée par ceux qui deviendront rapidement le noyau essentiel des Kreujistes.
Dépourvue de permanences d’accueil-écoute depuis son départ forcé d’Aides 54 puis de la Mutualité Française, Equinoxe a tenté fin décembre 2011 un pari qui s’est avéré gagnant : louer elle-même ses locaux à Nancy et ressusciter le Centre LGBT de Lorraine-Sud (disparu fin 2007), affilié à la Fédération LGBT.
Evidemment, cette initiative porteuse a suscité la plus vive hostilité de la Ville de Nancy et de sa meute de satellites associatifs. D’où d’incessantes polémiques en comités de pilotage, sous l’œil faussement neutre de la municipalité, qui aurait dû apaiser et assainir, sans jamais prendre parti pour qui que ce soit, ces réunions-pugilats qui laissaient de toute évidence augurer de graves dissensions dans le futur.
Outre l’offense faite à Jean-Pierre Humblot le 1er août 2013, cette configuration kafkaïenne a conduit à d’autres prises de position pour le moins douteuses. Dernier exemple en date, les fondateurs du « Kreuji » ont préféré rédiger le 5 juin 2014 un communiqué condamnant notre « extrémisme » (sic), moins de 48h après la dégradation du Centre LGBT Equinoxe par les néofascistes de Lorraine Nationaliste, également auteurs de menaces de mort sur la Marche des Fiertés [cf. document 3], plutôt que de nous soutenir dans nos démarches judiciaires, dont la Ville de Nancy est également absente ! Pour rappel, 2 des 6 néofascistes impliqués seront jugés le 30 janvier 2015 pour « menaces de mort faites sous condition en raison de l’orientation sexuelle », au terme d’une procédure à la seule initiative d’Equinoxe Nancy Lorraine.
Sans jamais entrer dans ces polémiques subalternes, notamment sur les réseaux sociaux, Equinoxe s’est constamment concentrée sur sa construction et son travail de terrain, toujours au contact du grand public. Notre association a terminé l’année 2012 à 63 adhérents, l’année 2013 à 78 adhérents, et l’année 2014 à 99 adhérents. Une claque pour tous les malfaisants ! Equinoxe, au vu de ce travail, a même été agréée « Jeunesse & Education Populaire » en novembre 2013, puis reconnue « d’intérêt général à caractère social » en juin 2014.
La Ville de Nancy, pendant ce temps, a tenté de nous affaiblir en nous attribuant une subvention de fonctionnement dérisoire, et systématiquement en baisse : 1000 € en 2011, 900 € en 2012, 800 € en 2013, et… rien à ce jour pour 2014, malgré d’importantes activités d’accueil-écoute, de prévention, de militantisme, d’accompagnement juridique des victimes et de convivialité à destination des LGBT et de leurs proches, et malgré un nombre de membres multiplié par 5 en trois ans !
Dans le même temps, des subventions à peine moindres étaient versées à des groupuscules aussi passifs qu’intolérants. Détail qui vaut le coup d’œil : le Club Alter Egaux, très hostile à Equinoxe, continuait à percevoir des financements publics [cf. document 5] alors qu’il comptait moins de 5 adhérents et que son président auto-proclamé, proche de l’adjointe chargée de piloter le futur « Kreuji », n’était même pas déposé en Préfecture de Meurthe-et-Moselle comme il se doit, ce qui lui a valu une dissolution à son insu… [cf. document 4] Au-delà de l’aspect comique de ce fait divers, le contribuable nancéien appréciera cette légèreté !
Interpellée sur le sujet des subventions en février 2014, lors de l’anniversaire d’Equinoxe, Mme Lucienne Redercher a invité textuellement son président « à aller voir ailleurs », devant une quarantaine de témoins un peu déstabilisés par ce mépris, et a prétendu que dans le contexte actuel, les finances publiques étaient à flux tendu. Certes, mais la Ville de Nancy sait trouver les fonds pour les associations qui végètent dans son orbite.
Avec le recul dont nous disposons aujourd’hui, 3 ans après la violente scission d’octobre 2011, et à la lumière des liens tissés entre les sécessionnistes, nous nous interrogeons ouvertement sur le rôle joué par la Ville de Nancy dans cette opération.
Les revendications LGBT, devenues trop clivantes pour l’électorat homophobe de Laurent Hénart ?
Laurent Hénart signait autrefois, chaque année, la plateforme des revendications du Collectif LGBT Lorraine, organisateur de la Marche des Fiertés LGBT régionale. Cette plateforme inclut l’ouverture du mariage républicain à tous les couples, l’accès à la PMA pour toutes les femmes, le changement d’état civil libre et gratuit pour les personnes transgenres, et l’ouverture du don du sang aux homosexuels. Dans le contexte électoral cité précédemment, le nouveau maire s’est bien gardé de s’aventurer sur un terrain aussi périlleux en 2014, devant ménager son futur délégué aux écoles de LMPT ainsi que Denis Gabet, l’ultraconservateur de « Nancy ville humaine » qui lui a apporté son soutien entre les deux tours.
D’une manière générale, la Ville de Nancy ne souhaite pas mettre en évidence trop publiquement son appétence présumée pour les revendications LGBT. Par conséquent, elle est devenue la reine de l’équilibrisme politique, avec un affichage de soutien très marqué auprès des publics LGBT et du milieu associatif, mais une totale invisibilité auprès du grand public. Le site Internet municipal ne mentionne jamais aucune actualité LGBT, et ne pipe par exemple pas un mot d’une Marche des Fiertés que la Ville prétend soutenir.
Au-delà de l’actuel « Kreuji », la journée du 17 mai est particulièrement emblématique de cette démarche de pure communication : l’organisation d’un événement confidentiel et consensuel où ne sont invités que des LGBT, si possible responsables associatifs de la région, mais totalement invisible du grand public, dans l’entresoi maximal et l’endogamie « militante ». En revanche, la Ville de Nancy n’avait pas hésité à s’opposer formellement à ce qu’Equinoxe et l’ANT puissent, le 17 mai 2013, implanter un peu de matériel pour mener leur traditionnelle action de rue, militante, auprès du grand public de l’agglomération.
La Ville de Nancy, ou comment retrouver 200 m² de locaux au fond de son sac
Le « Kreuji » devait avoir pour adresse le 165 rue Saint-Dizier à Nancy, en lieu et place d’un ancien poste de police, à proximité immédiate du centre-ville. Ce grand local de 138 m² visité par les associations en juillet 2013 avait été validé dans l’enthousiasme quasi-général le 28 novembre dernier. Quasi-général, puisque déjà Equinoxe et l’ANT s’étaient abstenues lors du vote, jugeant le lieu inadapté et peu chaleureux pour l’accueil LGBT, handicapé il est vrai par les barreaux aux fenêtres… Avec arrogance, Lucienne Redercher avait alors rétorqué que « la Ville de Nancy n’avait que ça à proposer », que c’était « à prendre ou à laisser ».
Sans grande surprise, le projet a totalement changé de braquet une fois notre retrait officiellement constaté. La Ville de Nancy a comme par enchantement trouvé de nouveaux locaux, bien mieux équipés et beaucoup plus adaptés, mieux situés dans la ville, proches de la gare. Bien loin, donc, de l’ancienne geôle miteuse que les autres associations avaient plébiscitée.
Interrogé dans le cadre de la participation du Front National au stand du « Kreuji » à la Fête des Associations, son président Pascal Dabel a fini, bien malgré lui, par lâcher le morceau : Equinoxe « ne supporterait pas la concurrence du Kreuji ». L’intention de déstabiliser le Centre LGBT de Lorraine-Sud, qui accueille depuis près de 3 ans les personnes LGBT à Nancy (en plus des 4 années d’accueil dans les locaux d’Aides 54 et de la Mutualité Française), est avérée. On doit bien reconnaître qu’on ne comprend pas bien la motivation de la Ville de Nancy, si ce n’est celle de tenter d’affaiblir Equinoxe, trop revendicative et trop indépendante à son goût.
Le pullulement de coquilles vides associatives n’aurait posé aucun problème si elle s’était réalisée dans un contexte pacifique. Nous n’avons pas vocation à évaluer les associations, toutes légitimes à la condition qu’elles ne soient pas discriminantes, et que le travail de nos bénévoles reste un tant soit peu respecté. Mais, face à une telle hostilité envers Equinoxe et l’Association Nationale Transgenre, face à la négation du travail accompli dans la région depuis presque 7 ans (bientôt 11 ans pour l’ANT !), il était impossible pour nos associations de rester impliquées dans un projet où elles n’étaient clairement plus les bienvenues.
Conclusion
Equinoxe Nancy Lorraine déplore d’avoir eu à quitter le projet « Kreuji ». Notre association, composée intégralement de bénévoles – pour la plupart salariés – et dont l’orientation a toujours été foncièrement militante, n’a pas vocation à « se battre » contre des institutions supposées pro- égalité, et encore moins contre d’autres associations LGBT, aussi groupusculaires et hostiles soient-elles.
Afin de fonctionner, le Centre LGBT de Lorraine-Sud que nous animons depuis 3 ans par nos propres moyens, avec ses qualités et ses imperfections, sans soutien politique et financier significatif de la Ville de Nancy, a besoin au bas mot de 7 000 € par an. Notre mission première est de proposer nos compétences et notre disponibilité aux personnes LGBT et leurs ami-e-s qui nous sollicitent. Nous serions donc bien heureux d’avoir cette charge de travail (la collecte d’imposants fonds) en moins sur nos épaules de bénévoles.
Mais nous refusons résolument de renoncer à nos convictions pour quelques mètres carrés supplémentaires, aussi luxueux soient-ils. Nous continuerons à défendre avec combativité et indépendance les valeurs d’égalité qui nous sont chères. À l’image des associations de la Fédération LGBT, animant sans problèmes particuliers des centres LGBT unitaires dans les villes de Bordeaux, dirigée par M. Alain Juppé, ou de Nice, dirigée par M. Christian Estrosi, pourtant UMP, Equinoxe poursuivra son travail avec toutes les forces politiques et citoyennes œuvrant pour l’égalité réelle des droits, quelles que soient leurs couleurs partisanes ou leurs appartenances confessionnelles. Mais jamais, contrairement à d’autres, nous ne jouerons les passe-plats de La Manif pour Tous, du Front National, ou de tout autre mouvement homophobe !
Dans ce long processus démarré en janvier 2012, Equinoxe Nancy Lorraine a commis une seule erreur : avoir beaucoup trop attendu avant de partir. Notre association a fait preuve d’une immense patience face aux incessantes polémiques internes et aux dérives politiques de la Ville de Nancy et de ses porte-valises. En fait, nous aurions dû partir le 2 août 2013, au lendemain du scandaleux « hommage » d’un transphobe notoire à Jean-Pierre Humblot.
Le Centre LGBT de Lorraine-Sud qui, contrairement au « Kreuji », n’est pas inféodé à la droite locale, a d’ores et déjà les moyens de fonctionner en toute autonomie. Fidèle à ses valeurs fondatrices, Equinoxe continuera à mettre en concordance ses paroles et ses actes au service des valeurs qu’elle défend. Nous refusons de cautionner l’absurde tour de passe-passe politique qui amène Laurent Hénart à essayer, contre l’évidence, de s’afficher pro-égalité auprès de cautions LGBT totalement soumises, tout en ménageant son électorat homophobe.
Puisque la Ville de Nancy est décidée à diviser le mouvement LGBT en promouvant contre nous un « Kreuji » totalement sous sa tutelle, nous ferons bon usage de notre habituelle liberté. L’argent est-il plus important que nos droits ? À l’évidence non. Nous appelons donc toutes les personnes soucieuses de liberté et d’égalité des droits, et opposées comme nous à la banalisation de l’homophobie, à nous soutenir.
L’épreuve des faits est d’ores et déjà en notre faveur : Équinoxe, malgré une hostilité frénétique à son égard du nouveau maire de Nancy, a plus que jamais déployé, dans la limite des moyens dont elle dispose, sa palette d’activités d’association LGBT généraliste ouverte à toute personne bienveillante. Accueil-écoute, militantisme, prévention/santé, convivialité, soutien juridique aux victimes, devoir de mémoire : nos bénévoles ont servi toute l’année 2014, sur le terrain, ces missions au service des personnes LGBT, mais également du grand public. Si Équinoxe a conservé sa ligne militante, elle a aussi su attirer à elle et fédérer les énergies grâce à une diversification de ses activités ludiques et conviviales.
La force d’Équinoxe est avérée par une augmentation sensible de ses adhérents : +30% en 2014 ! Dans cette période où les porte-flingues de la droite locale et du FN se sont ligués contre nous, tous les indicateurs sont au vert pour l’association. Son bilan a logiquement été largement conforté par le vote des adhérents en Assemblée générale, le 15 novembre 2014. Le bilan de notre président et de toute l’équipe sortante a été plébiscité. Conforté par les votes, le CA a été élu à l’unanimité et s’est dans le même temps ouvert à de nouveaux responsables, dont certains adhérents issus de la nouvelle génération, qui n’a pas connu les combats passés, mais s’engage avec enthousiasme pour faire vivre plus que jamais l’association et ses engagements. La nouvelle équipe, largement renouvelée et augmentée, est marquée par la mixité (4 femmes pour 5 hommes) et par sa capacité à représenter la diversité LGBT, chacune de ses lettres étant représentée dans l’équipe.
Le 13 décembre prochain, soucieuse de toujours aller de l’avant et de tourner cette page, Équinoxe Nancy Lorraine (Centre LGBT de Lorraine-Sud) inaugurera ses nouveaux locaux, en plein centre-ville de Nancy.
Après le temps des bilans, ce sera celui de la fête !
L’équipe d’Équinoxe Nancy Lorraine